Brooklyn Microgrid, la communauté locale d’énergie New Yorkaise


Brooklyn Microgrid : de quoi s’agit-il ?

Brooklyn Microgrid (BMG) est un projet de système électrique décentralisé communautaire à l’échelle d’un quartier. Le projet est soutenu par l’Etat de New-York, via New York State Energy Research and Development Authority (NYSERDA). Le projet est de créer une place de marché locale de l’énergie, elle permet aux prosumers (particuliers ou petites entreprises produisant de l’énergie solaire), de vendre leur surplus de production d’énergie solaire aux habitants locaux.


Comment ça marche ?

Dans un premier temps le projet BMG proposait une redistribution priorisée de l’énergie qui était décomposée en deux parties :

  • Producteurs/consommateurs équipés de panneaux photovoltaïques (PV)
  • Bâtiments Consommateurs divisés en trois groupes selon leur degré de criticité : d’abord les hôpitaux ou bâtiments publics, puis les pharmacies et commerces, et enfin les bâtiments résidentiels.
  • Dans un premier temps, BMG ambitionnait de fournir de l’énergie en cas de coupure généralisée et maintenir les bâtiments alimentés selon leur degré de priorité. L’échange entre producteur et consommateur se ferait à l’aide de smart contracts s’appuyant sur la technologie Blockchain Ethereum qui offre un registre infalsifiable et décentralisé des transactions.

    Aujourd’hui, le projet BMG a été repensé, notamment en créant Exergy, une plateforme de gestion de données qui est spécialisée dans la transaction locale d’énergie à travers l’infrastructure du réseau existant.


    Où est l’innovation dans tout ça ?

    Produire de l’énergie localement n’a rien de particulièrement nouveau, ou spécifique au cas de Brooklyn. Des milliers de smart grids apparaissent dans le monde, alors en quoi Brooklyn représente une expérience énergétique singulière ?

    D’abord, la désintermédiation. Les transactions de tokens d’énergie sont réalisées directement en peer-to-peer, sans intermédiaire centralisé, ce qui rend le système plus efficace et efficient. Les coûts de transaction sont faibles, et indépendants des volumes échangés : peu importe que la transaction corresponde à la valeur d’un panneau solaire ou à celle d’une centrale solaire de 500 MWh. Cela coûte au système la même quantité d’énergie et de frais généraux.

    Ensuite, la transparence. Ethereum offre une vision commune et partagée d’une même réalité.

    Enfin, la sécurité et la fiabilité. Une fois un bloc de transaction créé, il est impossible de l’altérer car il faudrait le consentement de tous les utilisateurs de la chain. Pour modifier le système, il faudrait donc hacker chaque utilisateur, et de façon simultanée. C’est (presque) mission impossible.


    BMG est-il reproductible en France ?

    Ce genre d’initiatives existent déjà en France sous la forme des communautés locales d’énergie, autrement appelé « autoconsommation collective ». La différence notable réside dans le fait que les échanges ne se font pas via une blockchain mais par l’intermédiaire des compteurs Linky, géré par ENEDIS.

    La France a en effet accéléré depuis quelques années la digitalisation de la distribution d’électricité pour permettre de faciliter la gestion des flux mais aussi de générer ce genre d’initiatives locales. L’objectif est de changer notre manière de consommer de l’électricité en s’appuyant davantage sur la production d’énergie renouvelable de source locale. Ce changement d’avenir doit permettre la transition vers de nouveaux modes de vie, moins dépendants des énergies fossiles et/ou d’un système centralisé pour basculer vers un système décentralisé, plus circulaire.

    Le modèle BMG est donc possible en France, la difficulté restera cependant toujours la même avec une énergie d’origine solaire : la capacité de production, intermittente qui nécessite donc un rattachement constant au système central d’électricité. Ce genre d’initiatives va augmenter dans ces prochaines années, notamment par la nécessité collective de trouver des alternatives aux énergies fossiles et par le besoin en Europe de ne plus être dépendant d’un point de vue énergétique d’autres pays.


    Conclusion

    Brooklyn Micro Grid n’est pas encore un projet complètement abouti et sert pour l’instant de laboratoire à une technologie prometteuse. Force est de constater une réelle dynamique sociale, compte tenu de l’engouement des habitants du quartier. Ce qui attire ici, ce n’est pas tellement la technologie utilisée, mais plutôt la dimension collaborative et communautaire du projet.

    Quoi qu’il en soit, la Micro Grid de Brooklyn préfigure sans doute les systèmes énergétiques de demain. Les citoyens consommeront une énergie de source renouvelable et produite localement. À l’échelle du quartier ou de la communauté, ils pourront gérer de manière autonome leur production et consommation d’énergie.

    Dans cette perspective, les énergéticiens traditionnels devront bientôt devoir faire face à de nouveaux concurrents : les communautés.  Dès lors, il est critique d’adopter une stratégie en rupture avec les modèles énergétiques centralisés traditionnels. Ainsi, en Allemagne par exemple, RWE accompagne déjà des projets de Micro Grid semblables à celui de Brooklyn, avec un partenariat avec la start-up Slock.it sur les bornes de recharge électriques. Au lieu de se poser en opposant réfractaire au changement, soucieux de conserver des positions acquises au siècle précédent, RWE a ici l’intelligence d’être acteur d’un changement inéluctable. Les smart grids offrent en fait une opportunité de relais de croissance pour les énergéticiens.

    Aider les citoyens à mieux consommer de l’énergie, via des smart contracts par exemple, fait sens économiquement et socialement.

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